Textes de Rachel DESIR
Tolérance

Armstrong, je ne suis pas noire de cœur.
Coulée de peau,
main mendiante entre ses seins,
il entame la première danse,
valse fugitive
d’un petit bal masqué
où le temps saisonnier
fleurit leurs pensées.
La rose trémière
hameçon en leur cœur
d’amants à tisser,
où l’alliance
d’une neige éternelle
et d’un henné de soleil
ébranle la toile métissée.
Nourrissons cherchant le téton
d’un originel bourgeon,
premier vol d'un goéland
et d’une grue cendrée,
les ailes déployées
vers une île abandonnée
où émigrera leur dessein.
Où viendront nidifier
leurs vœux,
rondo de givre,
entres leurs lèvres
la frêle brindille
d’un regain
où leur rêve d’hirondeaux,
trêve d’un instant,
se peindra aquarelle
sur l’écharpe du vent,
leur âme enfin à quai,
angel grisée.
Regard sur la forêt

Impatience d’immortelle.
Terres nues sous les rais du matin,
sous les blêmes silences de l'absence
qu'un orgueil de gitan
a dessiné dans le temps.
Froids gris mes murs de silence
et l'absconse des cieux
dans la brume du bleu de ses yeux,
l’abstinence du chemin de la vierge.
ô ! Marie prie pour elle.
Ses regards de lumière divine m’aspergent,
retombent mes souvenirs aux cases de marelles
dans ces funestes ruelles.
Pestilentielles les larmes de pucelles
s'en vont jouvencelles heureuses,
éperdues et veuves joyeuses
au cœur de nuit rose et soyeuse.
Porcelaine fugueuse du crépuscule alangui,
tiges endormies dans la vallée,
seule et souffreteuse,
assombrie d'un chapelet d'ombres.
Sous les belles agonies de décembre
s'enlacent les souffrances d'octobre,
s’entrelacent une douce agonie et son ironie
telles des ives.
L’agonie suprême s éternise.
L’amour en liberté
entravé par des lambeaux de soleil
jusqu’au seuil
des pleurs de la nuit
attablée à son écueil
à chaudes larmes,
à chaud de larmes,
chaux vive.
Tendre la main en rappel
aussi loin que son appel,
sous les arbres en ombrelles
s'évanouissent les ailes des caresses.
S'étreignent des baisers sans noblesse
d'une fatigue de tendresse
scrutant les monts,
les vallons
et les voix baissent
lancinante aphasie qui s'éveille,
lèvres tremblantes, rouge vermeil,
bouche en sommeil de l'ivresse,
la chair en faiblesse.
Lune d'hirondelle et sa liesse
que blesse un oiseau de passage,
naufrager clandestin d'une aubade de jardin.
Saignante sous les draps, mâtins,
du matin
qu'un amant a conjugué au présent
sous les accords du verbe aimer
et fructifie la graine qu'elle a semée.
Rachel Désir / coécrit avec AL
http://www.copyrightdepot.com/cd32/00050918.htm
Le mendiant de la casbah

Perfusion d’un leurre.
Les maux sont des silences, les mots les effacent. Tes lèvres en abstinence, ta bouche sous l’obédience, la porte rouge reste close … Ta vie défile lancinante dame blanche au gré des marches, tout en haut de l’escalier ta femme, Marie-Ange attend son mari ange … Peut être par une nuit plus froide, viendra-t-il la rejoindre … Le souffle gercé par les gorges sans fin de cette rue profonde où le gris d’une ardoise, pavés de son existence, se meuble de cruor. Un peu d’eau dans un pichet pour apaiser ta peau desséchée, tes mains lasses, bleuies par l’indifférence, vol du grand cormoran au chœur pourpre de l’azur. Entre tes doigts se noyaute poussière ta terre brûlée, une trêve de bois, frêle canne de hêtre d’un jeu de paume, être touareg. La poudrière des roses des sables ambre tes paupières, filigrane d’un phare au loin. Le far du roi te fait saliver … Des souvenirs en rappel, peigneur de chanvre, s’effiloche la laine de l’agnelet dans la bergerie sauvage. L’adage des mendiants, tremble leur âme au levant jusqu’à la poupe du couchant. Bohème ne cambre pas trop vite ses reins ! Gonfle sa chemisette, fusain de poitrine, tire la chevillette, la bobinette cherra et d’hydromel il s’enivrera.
Rachel Désir http://www.copyrightdepot.com/cd32/00050918.htmMontée vers le paradis

Hélix.
Quelques mots épinglés, un regard noyé, le temps efface le chemin de l’enfance. Baromètre éphémère, ses vagues lasses caressent la grève des jours tendres. Inlassablement un cœur grince, le froid et le vent, des kilomètres dans le givre, des souvenirs, des larmes et des rires, des rêves et un glaive. Se vendre, enchérir sa route, le souffle en rappel, quelques cailloux de plus, sable de rue, dunes de lune.
Rachel Désir http://www.copyrightdepot.com/cd32/00050918.htmLe fruit défendu

Fruit d’insolence, pomme des cieux.
L’aube est tombeau,
et Circée au pourpre
de tes lèvres fosse
s’agglutine comme un souffle chaud.
Au port de sa peau
flotte un cargo.
Ici-bas ses petits riens,
hissez haut marins !
Un matelot niais,
agnelet
sous l’algèbre de ses courbes,
paysage autiste.
Fourbe !
Nier la rose,
au gré du vent,
la yeuse coureuse
hymne dans le temps
et la croqueuse joueuse,
benêt,
viens voir si ta mie
est fleur éclose.
gelée royale étalée
sur son buste fleuri.
La vague rose les emporte,
l’eau bleue sans surface reflète les visages brisés,
les yeux amusés,
corps nus musent dans les chemins sinueux,
cornent les muses, expirent les chants des cieux.
Toute la nuit l’aube attendait la mort des vagues,
la douce agonie des sens en flamme,
cornemuses voguent
en ce matin lames.
Saints ! Lourdes, les corps pèlerins,
seins lourds et beaux reins,
purifier les tentations
en érotiques ablutions.
Odeurs de seins tétés
odes et heurs de sainteté
en arabesques bleutées,
voile bleu camoufle les baisers roses,
et des lèvres ecchymose
se font fleur bleue,
humectées chairs nues en osmose
henné de Savoie bleu
et robe moulante petit pois
libertine affamée, l'air bourgeois
prie nue tenant le cierge en bois,
de sa main toise,
octaves d’Ulysse.
Tournoyant dans la ronde turquoise,
douve,
se fondent dans le cosmos
deux âmes,
louves.
. Coécrit avec AL
http://www.copyrightdepot.com/cd32/00050918.htm
Date de dernière mise à jour : 06/03/2020